La Tribune Ville de Septembre 2022

14, September 2022

À l’ombre des marronniers

Il était une fois trois marronniers centenaires. Des arbres vénérables d’une hauteur de plus de 20 mètres et des troncs d’une circonférence de 3 mètres. Disposés en triangle, ils forment un ensemble protégé en tant qu’espace boisé classé dans le plan local d’urbanisme de Chartres.

Nous pouvons penser que leur âge, leur développement, leur bonne santé, leur situation dans un cœur d’îlot, leur imposante stature bien visible depuis les axes environnants et leur classement au PLU les rendent invulnérables…Et pourtant, il n’en est rien. La majorité vient d’autoriser leur abattage !

Pourquoi ? Parce qu’ils gênent un peu… Un projet immobilier de 37 logements a été autorisé sur le site de l’ancienne chambre des métiers au 24 boulevard de la Courtille. Ce projet, co-porté par la SEM Chartres Développements Immobiliers et par un promoteur privé, prévoit des parkings souterrains et des façades à raz des arbres. Au lieu d’adapter le projet au patrimoine arboré, les porteurs de projet préfèrent raser ces arbres plantés il y a au moins 4 générations pour construire quelques mètres carrés supplémentaires vendus à prix fort. Le profit à tout prix.

Nous avons vécu cet été des canicules et vagues de chaleur sans précédent. Les conséquences sont désastreuses : rendement agricole, incendies, sécheresse… En situation de crise depuis l’arrêté préfectoral du 4 août, Chartres est ainsi passé tout près d’un arrêt de la distribution d’eau potable en plein été, faute de ressource suffisante.

À l’heure où la renaturation devrait être une priorité pour adapter notre ville au défit climatique, l’imperméabilisation des sols par la bétonisation se poursuit à Chartres, privant le sous-sol d’infiltration naturelle. Cette bétonisation renforce les îlots de chaleur urbains. Les arbres plantés sur les socles en béton ne vivent que sous perfusion artificielle. Que se passera-t-il lorsque les restrictions d’arrosage imposeront leur mise à l’arrêt? Ils s’assécheront rapidement et mourront.

Les arbres en pleine terre, à l’image de nos trois marronniers, sont profondément enracinés. Ils sont de véritables climatiseurs naturels : des poumons verts indispensables à l’équilibre entre les besoins d’une ville et les besoins de la vie. Leur préservation aurait été possible avec un projet immobilier implantant les bâtiments et parkings de manière intelligente. Les trois feuillus auraient porté une indispensable ombre naturelle aux façades des immeubles en plein été. C’est aussi ça le « haut standing ».

L’association Chartres Écologie a porté un recours pour stopper l’abattage de ces arbres et reste vigilante sur tous les projets immobiliers facilités par l’actuelle majorité. Néanmoins, difficile de stopper un système orchestré par M. Gorges, visant à densifier la ville au maximum. Le document d’urbanisme (PLU) voté par la majorité en 2016 favorise la densification excessive dans tous les quartiers. Les outils des principaux constructeurs ? la SPL Chartres Aménagement, dirigée par M. Masselus (adjoint aux finances), la SEM Chartres Développements Immobiliers, dirigée par Mme Fromont (première adjointe) et les autorisations d’urbanisme délivrées par Mme Dorange (adjointe à l’urbanisme). Tout est verrouillé par le même quatuor, depuis 20 ans. Nous continuerons à leur expliquer que construire un cadre de vie et anticiper l’avenir n’est pas qu’une addition de chiffres sur un bilan comptable pour dégager un maximum de bénéfices.